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Anne Sander, ou le Dreiland au coeur de l'Europe

L'interview du 18 septembre 2015
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L'interview du 18 septembre 2015

L'interview du 18 septembre 2015

18.09.15, 9:00 am

Anne Sander arrive, le visage illuminé par un sourire contagieux, quand nous la rencontrons à neuf heures du matin au sein du Parlement à Strasbourg. Après avoir passé au travers de méticuleuses normes de sécurité et de couloirs interminables, nous l’attendions dans son bureau avec son assistante, madame Huck-Hiebel, dans l’espoir de lui piquer une petite heure de son agenda déjà trop chargé. Nous nous installons, Philippe et moi, en face d’elle, un peu impressionnés mais trop heureux d’être là, et je commence avec entrain à poser mes questions, pour ne pas perdre trop de ce précieux temps.

Anne Sander me raconte alors son premier investissement associatif à la Jeune Chambre Economique de Haguenau de 2001 à 2013, grâce à laquelle elle se familiarise très jeune avec le développement de projets économiques, sociaux et humanitaires, jusqu’à en devenir la présidente régionale.[1] Plus tard, en 2007, elle intègre le CESER (Conseil économique, social et environnemental régional), où elle sera amenée à rédiger des avis sur les politiques publiques, la citoyenneté et la culture dans la région du Rhin supérieur. Elue en tant que vice-présidente de la commission « Territoires et coopération », elle restera au sein du CESER jusqu’à son élection au Parlement en 2014. Parallèlement à son doctorat en économie de l’Université de Strasbourg, elle devient attachée parlementaire de Joseph Daul, de 2000 à 2014.

Intéressée par son statut aujourd’hui, notamment en tant que seule alsacienne siégeant au Parlement européen, je lui demande de m’expliquer son rôle au sein de celui-ci, n’ayant que très peu de connaissances du quotidien d’un parlementaire. Anne Sander continue alors patiemment à me parler d’elle et de son activité, pendant que Philippe immortalise notre entretien avec son appareil photo. Elle siège donc actuellement au sein de la Commission Emploi et Affaires sociales et s’intéresse particulièrement à l’emploi frontalier. Dans cette commission de 55 personnes, les parlementaires échangent des informations sur les questions liées à l’emploi, écoutent les analyses des experts présents et enrichissent ensuite leur réflexion par des réunions de terrain sur les territoires concernés. Trouver des accords sur les textes peut se révéler une tâche ardue, les 55 membres ayant des positionnements politiques diverses. Il s’agit alors de faire des compromis.

Des négociations, c’est ce qu’il a fallu pour que les Etats-membres se mettent d’accord sur ce qu’on appelle le roaming, itinérance en français, une thématique proposée depuis longtemps par la Commission européenne, m’explique madame Sander, et qui avait déjà fait l’objet d’un article sur notre blog Dreiland News. L’itinérance, c’est « la faculté des abonnés d’un opérateur de réseau mobile à utiliser les services de téléphonie mobile de différents réseaux au fur et à mesure de leurs déplacements. »[2] Durant de longues années, le Parlement, le Conseil et la Commission européenne se sont réunis pour tenter de trouver une solution au problème de couverture réseau et de surtaxe téléphonique quand on passe d’un pays à l’autre. La loi pour l’abolissement des surtaxes sur le réseau entrera totalement en vigueur en 2017. Elle est une victoire significative pour l’Union européenne. Elle est l’expression de ce que peut apporter de bénéfique une bonne coopération entre les États membres.

C’est aussi dans une volonté de bonne coopération que l’UE entretient des relations étroites avec la Suisse. Je suis intriguée par la position de l’UE vis-à-vis de ce pays. En tant que journalistes pour Dreiland News, Philippe et moi ne pouvons éviter ce thème trop important, aussi intrigant qu’épineux. Anne Sander pondère notre enthousiasme par son pragmatisme : près de 120 accords sectoriels ont été conclus entre l’Union européenne et la Suisse (principalement contenus dans les Accords bilatéraux I de1999 et les Accords bilatéraux II de 2004), ce qui donne à la Suisse un accès direct aux principaux secteurs du marché intérieur de l’UE. Parmi les accords contenus dans le « paquet » bilatéral I, il y a un accord de libre circulation des personnes. Entré en vigueur en 2002, il garantit aux ressortissants suisses et à ceux de l’UE le droit fondamental de choisir librement leur lieu de travail et de domicile sur le territoire des États parties. En tant que membre de la Commission Emploi et Affaires sociales, la Députée m’explique que chaque nouvelle directive votée par l’Union européenne et couvrant un des accords sectoriels passés entre l’UE et la Suisse doit faire l’objet d’une transposition de la part de la Suisse, afin d’adapter en conséquence le droit suisse au droit communautaire. Afin de faciliter cette procédure de transposition, Anne Sander me fait part des réflexions actuellement en cours pour mettre en place un accord entre l’UE et la Suisse sur un cadre institutionnel commun qui régirait l’ensemble des relations bilatérales. Cependant, les négociations sur un tel accord sont pour l’instant gelées tant qu’une solution entre l’UE et le Suisse ne sera pas trouvée pour garantir la libre circulation des personnes malgré le résultat de la votation populaire suisse du 9 février 2014(demandant la mise en place de quotas pour les étrangers à partir de 2017)

Cette votation a fragilisé les accords énoncés plus haut, et le Parlement européen attend maintenant de vraies propositions de la part de l’Etat suisse pour sortir de l’impasse que représenterait la mise en place d’une telle décision pour l’avenir des relations UE-Suisse. Les travailleurs étrangers et frontaliers travaillant dans des entreprises suisses seraient directement impactés. C’est pourquoi l’UE tient aujourd’hui à rester ferme vis-à-vis de la Suisse lui rappelant l’importance de respecter les engagements qui sont les siens

Toujours sur le thème de l’emploi transfrontalier, mais sans plus aborder la Suisse, j’interroge alors la Députée sur l’existence d’institutions ou de plateformes au niveau européen informant des offres d’emploi dans la région du Rhin supérieur. Anne Sander, qui travaille en particulier sur cette thématique, m’indique alors qu’il existe un réseau européen intitulé EURES « visant à faciliter la liberté de mouvement des travailleurs au sein des 28 Etats membres de l’UE, de la Suisse, de l’Islande, du Liechtenstein et de la Norvège»[3] en les informant sur les offres d’emploi disponibles partout en Europe. Pour le cas particulier des régions frontalières, EURES se décline en EURES-T . Les conseillers EURES-T informent les travailleurs frontaliers sur les offres d’emploi disponibles de l’autre côté de la frontière, leur font par de la législation en vigueur et les accompagnent dans leurs démarches administratives. Ces conseillers spécialisés sont des conseillers de Pôle Emploi en France ou de l’Arbeitsamt en Allemagne, qui ont pu bénéficier d’une formation sur EURES grâce aux fonds européens mis à la disposition des États membres pour assurer le bon fonctionnement de ce réseau

Un autre thème traité actuellement par la commission dont Anne Sander est membre est celui du travail non déclaré. Ce problème est particulièrement visible dans les régions frontalières où il est plus facile de contourner la loi. Pour lutter contre ce fléau, Anne Sander et ses collègues ont voté cette année un texte visant à proposer la mise en place d’une plateforme européenne de lutte contre le travail non déclaré. Elle fonctionnera selon un système de coordination des différents services d’inspection nationaux, d’échanges de bonnes pratiques et d’information.

Le temps semble s’être arrêté quand je m’aperçois qu’il reste un thème non abordé pendant cet entretien, celui de la jeunesse. C’est avec une grande curiosité que j’écoute la Députée parler de son action auprès des jeunes, car nous n’entendons que trop peu d’informations sur les actions du Parlement européen quant à la jeunesse…ou alors nous n’écoutons pas à la bonne porte. Anne Sander me raconte ses rencontres au Parlement avec les scouts et la prochaine visite, en octobre, de 2500 jeunes des MJC (Maisons des Jeunes et de la Culture), où elle pourra expliquer le travail des députés et inviter ces jeunes à s’engager en tant que citoyens. La priorité de la Commission Emploi et Affaires sociales, par exemple, est la lutte contre le chômage des jeunes de moins de 25 ans. En effet, des outils financiers ont été débloqués dans un cadre global qui s’appelle « la garantie jeunesse » pour apporter une solution à ce problème et offrir un emploi ou une formation à tous les jeunes de moins de 25 ans, sans activité, qu’ils soient inscrits au chômage ou non, dans les 4 mois suivant la fin de leur scolarité ou la perte de leur emploi. Je lui demande alors ce qui a concrètement été mis en œuvre en Alsace, mais il semblerait que notre région n’ait pas eu recours à ces outils car beaucoup moins sinistrée par le chômage des jeunes que d’autres, où cette situation requiert une solution d’urgence. Pour autant, la Députée s’est penchée sur ces questions, notamment pour la région Champagne-Ardennes qui figure dans sa circonscription, et des rapports ont été émis pour savoir comment favoriser l’esprit d’initiative chez les jeunes. Ces rapports sont pris en compte par les Etats membres qui peuvent affiner leurs politiques individuellement selon les besoins de chaque situation.

Cet entretien était donc l’occasion d’entendre parler des détails de l’exécution du travail de député, une fonction très exclusive qui ne laisse pas beaucoup de temps pour d’autres activités. Etre député impose un rythme de travail accru, et pose le problème des voyages chronophages entre Strasbourg et Bruxelles. Pourtant, l’énergie dépensée en vaut la peine, nous confie Anne Sander, qui trouve son travail passionnant, elle qui siègera encore au sein du Parlement au moins jusqu’à la fin de son mandat, en 2019. Malgré ses nombreux engagements de députée, madame Sander a accepté de garder le contact avec notre association en témoignant de son soutien à Dreiland News par sa présence à l’élection de Miss Dreiland, le 24 octobre 2015. Nous serons très heureux de présenter la députée aux jeunes qui seront présents, qui comme nous apprécieront cette rencontre engagée et engageante qui marquera sûrement leurs esprits.

Sa "wikibiographie"

Anne Sander est la fille de Jean-Marie Sander, haut responsable agricole et ancien président du CESER, aujourd'hui président de la holding bancaire Crédit agricole S.A.

Née à Haguenau, elle passe son enfance à Ohlungen et fait ses études secondaires au lycée Notre-Dame des Mineurs à Strasbourg.

En 1991, elle obtient une maîtrise de gestion à la Faculté des sciences économiques de Strasbourg, puis un diplôme d’études supérieurs spécialisé en développement local en 1995, tout en travaillant au Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur à Marseille.

De retour en Alsace en 1998, Anne Sander est attachée parlementaire du député européen UMP Joseph Daul jusqu'en 2014. Elle est docteur en sciences économiques, et devient présidente de la commission « Territoires et coopération » au Conseil économique, social et environnemental régional (CESER), en Alsace. Elle a été présidente de la Jeune chambre économique de Haguenau jusqu’en 2013.

Article rédigé par Clémence Prillard

[1] La JCE est une organisation regroupant des jeunes de 18 à 40 ans qui s’engagent pour la vie de leur cité, de leur commune ou de leur région et qui montent des projets économiques, sociaux, humanitaires

[2] Wikipedia : définition de l'itinérance

[3] Les services de l'EURES

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