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The three-borders news blog and community: Basel-Baden-Alsace

La Régio pour le Togo


Bonjour Christophe ! Toi qui poursuis ta vocation d’enseignant spécialisé dans la région depuis plus de 20 ans, explique-nous en quoi la création de cette association s’inscrit dans ce goût pour le savoir ?

J’ai orienté toute ma vie professionnelle vers l’aide à ceux qui en ont besoin (élèves en difficulté), je crois que je ne me serais pas vu dans une classe « normale » avec des élèves qui travaillent sans problème. L’enseignant est là pour ceux qui n’arrivent pas à apprendre.

Je pense que ma première expérience de soutien scolaire au Togo en 2010, quand j’ai accompagné l’équipe JOC (Jeunesse Ouvrière Chrétienne) de Saint-Louis, Badja m’a parlé forcément en tant qu’enseignant. J’y ai vu l’immensité des besoins, et le désir d’apprendre de ces enfants qui étaient en vacances. Chaque jour, leurs parents les envoyaient à l’école, alors qu’ils avaient besoin d’eux aux champs, et chaque jour ils venaient avec plaisir !

Au Togo, je dirais que le besoin d'éducation est absolu. Pour sortir de leur précarité les enfants doivent absolument savoir lire, écrire et calculer. Sans cela, ils se retrouveront en précarité économique comme démocratique ! Car à quelqu’un qui n’est pas éduqué il est facile de faire avaler n’importe quoi ! D’après moi, pour être un vrai citoyen, il faut être éduqué.

Comment est née cette belle idée de projet, et comment as-tu réussi à la réaliser ?

L’envie d’agir est née de la constatation de la situation scolaire de ces enfants. Comme des yeux qui se sont ouverts, et qui ont ouvert le cœur. C’est un vrai défi que d’envoyer des enfants à l’école alors que les parents sont obligés de choisir entre les nourrir ou les scolariser (rappelons que l’école est payante là-bas). Nos parrainés sont tous soit des orphelins, soit des enfants très démunis. Pour moi c’était physiquement impossible d’aller là-bas et de revenir comme si de rien n’était. Mais j’observe qu’il y a deux éventualités, ceux qui l’acceptent, et ceux qui ne le peuvent pas.

Du coup nous avons lancé ça en janvier 2014, et comme je suis vice-président de l’association « Bâle en français », je me suis servi de cette expérience. C’est grâce à cela d’ailleurs que sa présidente Véronique Bidinger a rejoint le projet, ça a été un vrai parcours croisé.

En quoi consiste le projet exactement ?

C’est simple, pour 50 euros par an, nous finançons la scolarité d’un enfant, ce qui inclut la fabrication de son uniforme par le couturier ou la couturière du village, tout son matériel scolaire (cahiers, stylos, crayons, papier de couverture pour les livres…), ainsi que les écolages (frais de scolarité). Parfois, quand c’est possible, nous leur achetons même un petit cartable. Grosso modo pour moins de cinq euros par mois un enfant peut fréquenter l’école dans les meilleures conditions grâce à son parrain.

5€ ! Oui on peut se permettre une contribution si modique car l’association ne prend en charge ni les frais de voyage ni d’hébergement ni de nourriture de ses bénévoles.

Parallèlement, et en fonction de nos moyens, nous avons déjà eu l’occasion de soutenir des étudiants à Lomé. Faire des études supérieures revient très cher parce qu’il n’y aucune aide de l’Etat allouée, surtout pour les BTS dont la formation se fait au sein d’écoles privées.

Par ailleurs, nous tentons de lancer des projets professionnels comme aider à ouvrir une caféteria, une épicerie, un bar, un magasin… pour que les jeunes puissent démarrer dans la vie et concrétiser un projet. Nous apportons également une aide financière et matérielle à l’orphelinat-pouponnière Sainte Claire de Tokoin à Lomé en leur fournissant des médicaments, du lait maternisé, du mobilier fabriqué sur place par un menuisier… comme par exemple une chaise évolutive pour un enfant handicapé.

Quel stade de développement a atteint l’association aujourd’hui et quels sont tes projets pour son avenir ?

Pour l’instant on a une centaine d’enfants parrainés, essentiellement dans les villages de Bagbé-Dokplala, Badja et Tovegan, situés à peu près à 40 et 60 kilomètres de la capitale. L’eau courante, et surtout l’électricité sont des choses rares. Au niveau des parrains, on retrouve une courte majorité de Français, les Suisses étant également nombreux, et quelques Allemands. Notre projet pour l’avenir serait d’étendre un peu les parrainages du coté de Weil am Rhein, Lörrach… afin de mériter véritablement le nom de « Regio pour le Togo » !

Sinon, j’ai personnellement de nouvelles idées, comme créer une sorte de parrainage institutionnel au-delà du particulier, c’est-à-dire qu’une boutique, une entreprise soutiendrait un enfant. Je pense d’ailleurs que les commerçants ou les industriels seraient friands de ce supplément d’âme pour leur affaire.

J’aimerais aussi lancer un projet agriculture et créer des sortes de coopératives agricoles en fournissant, par exemple, un motoculteur aux agriculteurs ou à la communauté villageoise. Il faut rappeler que les seuls outils dont ils disposent sont la houe (pioche à manche court) et la machette ; et c’est tout. Les villageois sont pratiquement tous cultivateurs de maïs et de quelques légumes et fruits.

Ce printemps, nous soutenons un projet de reboisement/agriculture dans la région de Bagbé-Dokplala (voir notre page facebook https://www.facebook.com/regiopourletogo?fref=ts):

pour 5 euros, nous finançons l’achat d’un pied d’oranger ou citronnier, son transport et son entretien. L’association est partie prenante du projet car une petite partie des bénéfices serviront à financer nos parrainés délaissés par leurs parrains en cours de route.

Quels avantages présente pour toi notre région tri-nationale pour le bon développement de ce soutien scolaire, toi qui d’ailleurs as choisi le nom significatif de « Regio » dans son intitulé ?

Pour moi, le niveau de vie entre la Regio basiliensis et les villages au Togo représente le plus grand écart, le plus grand fossé qu’on puisse trouver sur la planète ! La Regio c’est une région riche, et on peut toucher trois pays remplis de gens de bonne volonté, mais qui ne savent pas comment agir sans se faire abuser. Le nom a été créé dans la conscience de toucher aussi les germanophones. (N’oublions pas que le Togo était un protectorat allemand avant de devenir une colonie française.) Le peuple de la vallée du Rhin existait là bien avant l’établissement de nos frontières, donc pour moi, dire la région des trois « frontières » est antinomique. La Regio, c’est déjà ce peuple qui domine les frontières. Ici nous avons tout en trop, les Togolais n’ont quasiment rien. Ici on vit, eux ils survivent.

Merci Christophe pour ce témoignage ! Retrouvez toutes leurs actions sur leur page Facebook https://www.facebook.com/regiopourletogo


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L
Mes encouragements,belle initiative.L'Education pour tous et pour ce peuple en particulier.Merci pour ces efforts pour un monde meilleur.
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